Pour l’agroalimentaire, le média le plus séduisant du moment, qui peut être modelé à souhait, c’est Facebook. Dernière illustration en date, les conférences de Digital Paris des 11 et 12 avril dernier, congrès de marketing et “e-commerce de demain”. Au programme : ”Les réseaux sociaux : pour quelles attentes et comment y répondre ?”, ”Comment activer les communautés sur internet ?” ou encore ”Comment recruter, fidéliser et… AIMER vos fans sur Facebook ! ” Aujourd’hui, être sur Facebook est quasi indispensable et complémentaire de la présence sur les blogs. Notamment pour la galaxie des marques de l’agro-alimentaire.
Conséquence, Danone, Nestlé, Orangina entre autres prennent en main leur présence sur Facebook par l’entremise de fan pages dédiées à leurs produits industriels, animées par des agences ou des services de com’ qui, la plupart du temps, n’apparaissent pas es-qualité. Manière de contrôler les discours des internautes sur les réseaux sociaux, sans trop le dire. Oasis, ce sont quelques 2, 3 millions de fans, M&M en compte 1 640 000 et les commentaires atteignent parfois la barre des 300 pour un simple statut, Danette ce sont plus d’1 220 000 fans, Carambar dépasse les 700 000, Trésor de Kellogs, 470 000 fans et une grande dose de n’importe quoi.
Louis Naugès, blogueur chez ZDNet, raconte dans un article publié suite au Sommet mondial du numérique qui a eu lieu à Paris le 13 avril :
J’ai été frappé de voir à quel point Danone prenait au sérieux la dimension numérique de ses activités : Bernard Hours, Vice Président du Conseil d’Administration a parlé des marques comme des « personnes » sur les réseaux sociaux et expliqué que Danone consacre déjà 10 % de ses budgets publicitaires à Internet.
Danone étant avec sa page Danette et Marine De Danette, sa community manager dédiée une des entreprises les plus présentes sur Facebook (et l’une des rares à être identifiée comme travaillant pour Danone). Alors que la majorité des marques ne savent pas quoi faire sur le site communautaire, elles sont toutes d’accord pour en être. Marine Landré, la community manager de Danette explique surtout que ce qui compte c’est de “prolonger la discussion avec les consommateurs en s’efforçant aussi de répondre aux commentaires faits sur les posts de la marque” :
À l’entrée des marques sur Facebook, il y a environ deux ans, il a souvent fallu trouver un moyen détourné pour entrer en discussion avec les “fans”. Le divertissement a alors été un levier important. Mais pour une marque, il est important de garder ce lien au produit et donc de trouver le bon mix. Nous avons souvent des gens qui posent des questions sur le produit en lui-même : sa composition, l’achalandage, les nouveautés à venir, ou autre. Mais pas que. Après c’est aussi parce que c’est Danette.
Danette, très peu sujette à polémique reste une des pages les plus vivantes – après Oasis et Orangina – notamment par l’implication de sa community manager dans les relations avec ses fans et par l’image que la marque véhicule auprès des familles. Facebook est un espace marketing comme un autre.
Anne Lataillade, blogueuse culinaire et community manager pour un produit dessert, sollicitée à hauteur de 80 communiqués de presse par jour en moyenne, constate l’attrait des marques pour le site de Mark Zuckerberg tout en relativisant et en expliquant que “c’est difficile pour les marques qui ne sont pas très digitales”. En effet, selon le public cible et la culture marketing du groupe ou du produit appartenant à une marque, l’attrait des fans est plus ou moins grand. Et pourquoi les fans sont-ils si nombreux ?
Sur Facebook, le community manager s’adresse à la communauté de sa marque. Sur un blog, on s’adresse à la communauté du blogueur. C’est déjà un peu différent : on s’adresse à des fans donc à des gens qui ont une opinion positive. Et surtout, les gens ont envie de parler avec les marques, ils ont envie de discuter, de participer, qu’on leur demande leur avis. Pour ça, l’endroit c’est Facebook et pas nos blogs.
Dans un même groupe pourtant, certaines pages sont moins actives que d’autres : Danone qui cartonne avec sa Danette et les jeux proposés voit sa page Velouté Fruix mourir malgré ses 125 000 fans. Ce qui fonctionne : les jeux concours et les cadeaux. En clair la participation des fans de la page qui permet aussi par capillarité de récupérer des amis de fans. L’affectif pour la marque joue un rôle dans les adorateurs de la première heure : élevé à la Danette, il est d’autant plus facile pour un fan d’aller liker la page, et ce indépendamment de la marque. Et l’affectif est une des raisons pour lesquelles les marques savent qu’elles ont intérêt à être sur Facebook si elles souhaitent communiquer avec leurs consommateurs, adorateurs de produit. Nutella, qui ne possède qu’une fan page officielle internationale, attire plus de 15 millions de fans.
Charles Martin-Laval, fondateur de l’agence AdsOnWall, décrypte le paysage :
Depuis 2010, on sent vraiment une forte demande de la part des marques. Facebook avant c’était marginal. Maintenant c’est très très demandé. Tous les types de marques, surtout grand public. Les marques agro-alimentaires sont assez présentes et assez fortes sur le sujet. Quelques unes se sont fait connaitre. Oasis et M&Ms par exemple, pour lesquels il y a une image jeune – le critère est hyper important au lancement – dynamique, sympa décalée. Ce qui plait aux français.
Mais les fans pages ont un côté obscur, une face noire redoutée par les community managers responsables de la gestion des interactions entre les fans et les moins fans. On garde en mémoire l’opération de Greenpeace contre Nestlé et KitKat pour leur utilisation d’huile de palme. En mars 2010, l’ONG avait arrosé le web de sa publicité trash, pure imitation de la publicité KitKat Have a break have a kitkat, dans laquelle un cadre trentenaire mangeait des doigts d’orang-outan en lieu et place du biscuit de Nestlé, tout droit sortis de leur emballage. Moult réactions sur leur fan page plus tard, volonté de modération des commentaires par Nestlé et explications de la marque, fermeture de la page puis réouverture, l’affaire a fait trembler la fan page. Et par ricochets, la marque.
Passé ce mauvais coup pour Nestlé, d’autres ont défrayé la chronique : le community manager d’Orangina en juillet dernier a actualisé le statut de la boisson en apostrophant les fans d’un message tout en finesse : “Harry Potter c’est n’importe quoi, encore la magie on veut bien, les balais qui volent pourquoi pas mais un roux qui a des amis ?”. 354 commentaires aujourd’hui, la plupart négatif, d’autres plus nuancés.
Mais hormis les fautes de communication, depuis la marque, restent les spammeurs, commentaires indésirables et indésirés. Chez Danette, Marine Landré explique :
Il y a plusieurs types de spammeurs, à différencier. Si c’est juste un lien sans rien d’autre, souvent un robot : à titre personnel je me permets de le supprimer et reporter à Facebook, qui prend ensuite les mesures nécessaires. Il arrive aussi d’avoir des utilisateurs spammeurs (“les trolls”). Mais aussi des consommateurs mécontents. Dans ce dernier cas, aucune raison de supprimer : je laisse tous les commentaires négatifs, tant qu’ils sont en accord avec la charte de la page (pas d’insultes par exemple). Après sur Danette c’est assez rare puisque nous avons la chance d’être une “brand love” assez peu controversée donc.
La gestion de crise est non seulement une histoire de charte du bon commentaire poli mais aussi une histoire de génération. Ceux qui décident ne sont pas ceux qui se servent de ces outils de communications. Explication avec Anne Lataillade pour qui non seulement les décideurs ne sont pas toujours utilisateurs mais par ailleurs quand les marques ont compris ces outils, parfois, elles“en ont peur”. Peur de l’affront ou du scandale qui tâche ?
L’espace des fans laisse libre court à la contestation. La maitrise du discours lisse et propre n’est pas toujours possible et peuvent ressurgir divers scandales, de façon récurrente. D’autant plus que certains groupes sont maitres en la matière. Exemple avec le groupe 1% SPAM, aujourd’hui plus ou moins à l’abandon. Issu du mouvement des indignés, la page de l’évènement annonce la couleur :
“Si vous avez l’impression que vous êtes trop petit pour pouvoir changer quelque chose, essayez donc de dormir avec un moustique…vous verrez lequel des deux empêche l’autre de dormir”
- Dalaï Lama -
Le principe des membres invités : déposer du poil à gratter par commentaire sur les marques ou les produits qu’ils ont dans le collimateur. À commencer par “ceux qui ont tendance à vouloir nous faire “avaler n’importe quoi”! et la lisse communication sur un produit se retrouve face à la volonté des détracteurs. Leur objectif est avant tout de tirer la sonnette d’alarme pour les adorateurs de ces produits et prendre les entreprises dans le filet de la communication sur le net, dont Facebook. Avec pour simple principe d’aller porter et réagir sur les pages des grandes marques “toujours en respectant les règles de savoir vivre et la politesse.”
Dans leurs cibles :
- Parler des OGM sur la page d’un des produits Nestlé
- Demander si vous pouvez utiliser le chocolat à tartiner comme huile de moteur sur la page Nutella
Et leurs précautions : “Sachez repérer les “fake accounts” qui se chargent d’écrire des faux commentaires pour valoriser les produits sur les pages commerciales.”
Autre question soulevée par l’utilisation des réseaux sociaux, l’achat de fans et l’utilisation de faux fans – achetés eux aussi – ou comment ruiner son image de marque. Fred&Farid, une agence de publicité créée avec le soutien financier de Vincent Bolloré et trois anciens du groupe Publicis de Maurice Lévy, a de nouveau fait parler d’Orangina. Ils sont soupçonnés mi février par CoupsdePub.com d’avoir acheté des lots de fans pour la page du produit. En douceur, la marque dément aujourd’hui avoir été au courant de ce type de pratiques.
Pour Charles Martin-Laval ”c’est une dérive dans le sens où c’est la guerre au nombre de fans” et ce même si Facebook a permis d’en diminuer l’impact en intégrant aux fonctionnalités des pages un compteur d’interactions.
L’achat de fans, c’est pas qualifié du tout, il faut aller chercher sa cible. Ça ne sert qu’à faire jalouser ses concurrents mais pas plus. Au contraire ça apporte le risque de mauvais commentaires sur la page de la marque.
Au dela de l’achat en lui-même, les agences qui travaillent pour le community management des produits sont sous pression du résultat de fin de mois : la taille critique de la base fans flirte avec la crédibilité du travail de l’agence. Tentant donc d’atteindre par des moyens détournés un nombre de fans considérables.
“Je pense qu’il est important d’atteindre une taille critique sur une page Facebook, notamment pour pouvoir justifier des investissements dans le but d’animer la communauté (telles que des applications)” sourit Marine Landré. “Pour des petites pages qui sont moins surveillées cela est probablement tentant. Ceci dit je ne cautionne pas du tout cette pratique. Il y a eu un tournant entre l’arrivée des marques sur Facebook et ces six derniers mois : aujourd’hui de mon point de vue, l’engagement est le plus important. Aucun intérêt de rattraper Oasis.” “
THE WEB IS WHAT YOU MAKE OF IT
Eh bien Lady Gaga, elle, en a fait un puissant outil marketing. La tirade ci-dessus est tirée de la dernière vidéo promotionnelle pour Google Chrome feat. Lady Gaga. Une conception bien geek du net qui n’a plus de secret pour la Lady. A l’occasion du lancement de son nouvel album “Born This Way“, Gaga et son équipe de communicants ont élaboré une stratégie colossale avec à la clé une utilisation du web, des réseaux sociaux et du gaming, de manière exemplaire. Classé premier du classement Itunes dans plus de 22 pays, le nouveau né flirte avec le millions de téléchargements dès sa première semaine de mise en vente.
L’envergure universelle qu’a prise cette campagne promotionnelle rend sa présence web incontournable. Ce sont aussi des dizaines de partenariats activés sur la toile dont Zinga/FarmVille, Starbucks, Vevo, Hbo, Rdia, Itunes, BestBuy, Livestream, Gilt Groupe ou encore Amazon Cloud Player… il n’y a pas de doute, la Lady est LA reine du web-keting.
David C, auteur du blog advertisingtimes, nous offre un aperçu de cette opération hors du commun.
Aujourd’hui, un article un peu moins publicitaire mais plus marketing. L’actu pub n’étant pas au top et l’actu tout court ne parlant QUE de DSK, on va se tourner vers le marketing. Lundi, 23 mai sort le nouvel album de Lady Gaga : “Born This Way“, qu’on l’aime ou qu’on la déteste, on a tous au moins vu une fois, une action de Lady Gaga sur le net.
Parce que le net et Lady Gaga, c’est comme DSK et le sexe, c’est associé pour le meilleur et pour le pire. Bon, il s’avère que pour Gaga c’est pour le meilleur. En quelques points, nous allons voir comment la bougresse a construit presque tout son succès numérique grâce à un savant mélange de Community Management et de Challenge.
Première célébrité du monde à dépasser les 10 millions de followers sur Twitter, Lady Gaga est la première célébrité à comprendre et utiliser tout le potentiel de Twitter. Avalanche de tweets, utilisation active des logiciels photos type Twitpic, tirades romantiques envers ses fans, la Lady tweet et active une base fan acharnée. L’effet boule de neige est alors très rapide, plus elle se fait suivre, plus on la suit. Lady Gaga devient la reine de Twitter et le lui rend bien avec une vidéo dédiée.
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Au delà de Twitter, Lady Gaga mise aussi sur Facebook. Avec plus de 34 millions de fans (!) la bougresse a un auditoire très large et surtout très réactif (joie des réseaux sociaux). A contrario de Twitter, les publications sont plus rapprochées dans le temps et surtout accompagnées d’un élément visuel, textuel ou sonore. La présence d’applications, de vidéos, d’une newsletter… donnent à la page tout son intérêt. Chaque annonce a le droit à plus de 10 000 likes en des temps records. Le noyau dur de la communauté ajoute des photos par centaines, le reste suit une page active où tout le monde n’a d’yeux que pour la star (logique).
En parallèle à ça, un site web qui se veut le plus complet possible. Des dizaines de rubriques et surtout du push-social. Les widgets Twitter et Facebook sont là pour inciter un maximum de visiteurs à aimer la page ou follower le compte. Il y a là une véritable volonté de fonder et entretenir une communauté active de fans. Tout est fait pour accéder au site, même sur des réseaux comme My Space, pourtant sur le déclin. De surcroît, un forum et une boutique, destinés au noyau dur de la communauté, permettent un site ouvert et dynamique.
Site complet et actif + Page Facebook massivement aimée et commentée + Compte Twitter à la limite de l’explosion = Base Fan composée à la fois de purs fans et de simples amateurs, tous concentrés autour d’au moins un des trois endroits dédiés.
Le dernier opus de la chanteuse, “Born This Way” est sans hésitation l’un des premiers albums dont la promotion est autant axé réseaux. Sur 14 morceaux, ce sont déjà quatre d’entre eux (“Judas”, “Born this Way”, “The Edge of Glory” et “Hair”) qui ont été publiés en exclusivité sur la chaîne VEVO de la chanteuse, avant la sortie officielle de l’album prévue le 23 mai 2011. Mais certains ont eu le privilège d’avoir l’album en exclusivité, avant la sortie mondiale.
Pas de concours ou autre tirage au sort, mais le simple fait d’avoir un Samsung. En effet, première nouveauté, la miss a laissé la possibilité d’écouter l’intégralité de l’album gratuitement via une application téléchargeable depuis les mobiles Samsung. Possibilité également d’écouter l’album si il y a “Like” de la page dédiée sur Facebook. Un gros coup de marketing pour cette association Gaga-Samsung, qui laisse les fans aux anges.
Deuxième fait, l’association Vanksen-Samsung-Gaga. L’agence et la firme coréenne ont en effet créé un concours vidéo “French This Way”. Le but ? Publier sa vidéo dédiée à la star et, selon le nombre de vues, gagner différents lots. Dont LA rencontre avec la star. Une nouvelle occasion de challenger la base fan et de faire le buzz. Un évènement franco-français qui met les fans à contribution… toujours dans un but promotionnel.
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Au delà de ces opérations plutôt classiques, dans leur fonctionnement, Gaga a décidé (avec sa puissante équipe de communicants) d’investir les réseaux sous une autre forme. A travers le… Gaming. Puisque le gaming est sans hésitation la tendance des marques, pourquoi s’en priver ? Et quoi de mieux que d’y aller par la grande porte, avec le mastodonte Farmville. Le jeu aux millions de fans sur Facebook s’est associé à la star pour lancer… GAGAVILLE. Les internautes jouent et peuvent une nouvelle fois, gagner des places de concerts, des albums, des morceaux etc… Un nouveau moyen de jouer sur la viralité en combinant Facebook et du gaming.
Cet album est donc résolument accès sur les réseaux. Association avec Samsung, viralité du gaming, concours vidéos, possibilité de découvrir de nouveaux morceaux, autant d’exemples qui nous montrent la façon dont les communicants de Gaga maîtrisent le Web 2.0. La base-fan est challengée, le buzz prend, l’album est cité. La promotion numérique passe par de nouveaux aspects, notamment Farmville, et permet à Gaga de confirmer son statut de reine des réseaux.
Au delà de toutes ces innovations, la chanteuse mise aussi sur les partenariats. Dernièr en date avec Jean Paul Gaultier. Création d’un documentaire-interview, le document est évidemment mis en avant sur… Facebook. Page dédiée et nombreuses photos, toujours dans la logique de promotion virale. La page de Gaultier elle même est réquisitionnée.
Autre association : Starbucks. Présente sur le blog de la marque, la chanteuse y va de son petit grain de sel pour promouvoir l’album et permettre ainsi à Starbucks de confirmer son statut de leader, de café de star etc…
Lady Gaga s’associe à Google ! Un nouveau coup Webketing
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Déjà reine du marketing et du placement-produit dans ses différents clips, Lady Gaga a pris en compte l’importance de la base fan et des réseaux sociaux. De monstre marketing, elle s’est transformée en monstre des réseaux.
Les différents comptes de la star sont autant des tribunes ouvertes pour une communauté dont elle sait prendre soin. Omniprésente sur le net, elle s’affirme comme reine du Web-keting quand on la voit exploiter les ficelles du Gaming, créer des challenges vidéos ou des applications mobiles pour promouvoir l’album. Les équipes de communicants de la star exploitent à fond les tendances, qui, pour l’instant, le lui rendent bien.
A lire : “How Lady Gaga created a web marketing spectacle for Born This Way” sur Mashable
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Article initialement publié sur : advertisingtimes
Crédits photos CC flickr : mathe-kr
]]>[Préambule de Cyroul au billet, qu'il a accueilli sur son blog] Voilà un article écrit par un CM qui a décidé de ne pas dévoiler son nom pour des raisons professionnelles. Il ne s’agit pas du même anonyme que pour l’article sur le digital, paillasson de la publicité ; ici nous explorons le monde formidable des Community Managers en agence de pub. Car ce n’est pas facile d’être blogueur et Community Manager dans un monde où la marge est reine, et où le respect de ses clients n’existe pas vraiment. Mais je laisse la parole au Community Manager Anonyme qui vous racontera ça mieux que moi.
PS : si vous avez des remarques à faire au CM anonyme, faites-les en commentaire, ou envoyez-les moi et je transmettrai.
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Article imaginaire et je l’espère un petit peu drôle, tiré d’une agence imaginaire avec des protagonistes imaginaires, et avec un procédé honteusement inspiré de Maître Eolas et de son stagiaire, ce qui n’est que pure admiration de ma part.
Dans cette Agence, ils vendent du Community Management à leurs clients, parce qu’ils veulent tous une page Facebook et un compte Twitter, ou bien parce qu’un des commerciaux les aura convaincus qu’il fallait y aller avant leurs concurrents. Du coup ils recrutent toujours de nouveaux stagiaires pour animer ces pages, parce que, avouons-le, cela ne coûte pas grand-chose, et cela leur permet de marger dessus.
Un lundi, un Account Manager Social Media Consultant Confirmé accueille un nouveau stagiaire, sympa, frais, disponible, souriant, avec un tee-shirt de geek acheté sur Internet. Il doit donc le former et commence à lui expliquer sa mission en tant que Community Manager. Dans l’agence, son titre c’est Assistant Account Manager Social Media, mais Community Manager reste plus sexy pour l’extérieur. Lui est heureux et enthousiaste d’être devenu CM, métier qui fait bien dans sa bio Twitter s’il en est.
« Bon, mon petit, aujourd’hui on va ouvrir une page fan sur Facebook pour notre client, donc tu vas t’en charger. L’image d’avatar et les textes d’intro sont sur le serveur, c’est l’ancien stagiaire qui t’a préparé ça, mais pour la prochaine page que tu gèreras, tu devras le faire toi-même. »
Il part s’exécuter, guilleret, le cœur léger, heureux d’avoir ses premières attributions de Community Manager. Il revient ensuite vers son manager :
« Dis, comment je fais pour avoir des fans maintenant ?
- Ah, mais c’est tout simple ! Il suffit d’inviter tous tes amis !
- Mais en quoi mes amis sont tous intéressés par des pièces détachées de voiture ? Ils n’ont pas le permis pour la plupart…
- Tu te souviens de ton entretien ?
- Euh… Voui…
- Je t’ai demandé si tu étais blogueur tu te souviens ?
- Oui mais c’était pour savoir si je connais bien les médias sociaux !
- Mais non on s’en fout de ça, tout le monde est un expert en médias sociaux aujourd’hui, il suffit de lire les articles de liste qu’on voit tourner sur Twitter tous les jours. La réalité, c’est que comme tu es blogueur, tu as des amis blogueurs, donc tu vas les inviter à devenir fans de la page et comme ils sont influents, des gens de leur réseau, ceux qu’ils influencent tous les jours vont devenir fans.
- Mais je ne vois pas pourquoi ils accepteraient s’ils ne connaissent pas le produit…
- Mais parce que bientôt toi aussi tu vas recevoir des invitations à devenir fan de tout et n’importe quoi sur Facebook, de la part de tes potes blogueurs, tu crois que tu es le seul Community Manager de la place ?
- Mais c’est artificiel comme procédé non ? En quoi ça apporte quelque chose à la marque d’avoir des fans qui s’en foutent du produit ?
- Tu comprends rien toi, ce sont des influenceurs, on va créer le buzz ! »
Quelques semaines plus tard, le département social media de l’agence reçoit un brief pour une nouvelle gamme de yaourt. Le client veut des ambassadeurs pour « promouvoir sa marque sur les médias sociaux ». L’Account Manager Social Media Consultant Confirmé décide de confier cette reco à son stagiaire et lui indique la marche à suivre.
« Bon alors une stratégie d’ambassadeurs ce n’est pas compliqué, on va faire une chouette soirée et inviter des blogueurs. Du coup ils vont en parler sur leur blog et on enverra les liens au client.»
Ce sont les aléas de la vie d’agence, mais après la présentation de la reco du stagiaire par les bons soins de l’Account Manager Social Media Consultant Confirmé, le client annonce qu’il n’a pas le budget pour une soirée. Forcément, ils lui ont expliqué qu’il n’aurait personne s’il n’y avait pas un peu d’alcool à boire et des sushis à picorer, pas uniquement du yaourt aux fruits à manger avec du yaourt liquide à picoler.
L’Account Manager Social Media Consultant Confirmé explique donc à son stagiaire la marche à suivre pour quand même prendre le budget.
« Bon ce qu’on va faire, comme ils ont du yaourt à revendre, on va en faire cadeau aux blogueurs pour qu’ils en parlent.
- Ils vont faire un billet pour une boîte de yaourt ? T’es sûr ?
- Oui, bon tu as raison, on va leur dire qu’on en a plus et qu’ils peuvent en faire cadeau à leurs lecteurs.
- Cadeau aux lecteurs ?
- Ouais en faisant un concours, c’est une vieille ruse de Community Manager, comme ça il y a plein de commentaires, car les lecteurs de blog adorent les cadeaux, et c’est bien ça, ça fait de la conversation, le client sera content.
- Mais ce n’est pas un peu du sponso déguisé ?
- Roh, t’es pénible, le sponso on paie les gens pour faire un billet, là on fait un cadeau c’est pas pareil.
- Ah. »
Voyant qu’il n’était pas très à l’aise avec ce procédé, il décide de ne lui confier que la partie de propositions de blogs. Encore une fois, il revient vers lui :
« Dis, j’arrive pas à trouver beaucoup de blogs qui parlent de yaourt…
- Mais pourquoi tu cherches ça ? Non, je veux juste des blogueurs qui font beaucoup d’opérations blogueurs, ce sera facile à mettre en place. T’en as pas dans tes copains blogueurs ?
- Euh, non. Mais, des blogs qui font que des opés blogueurs, ils sont lus par des vrais lecteurs ?
- Oh, on gonfle un peu les stats pour le client, mais sinon bien sûr qu’ils sont lus, tu crois quoi ?
- Qu’il n’y a aucun intérêt à lire un blog qui ne parle que des marques qui prennent soin de lui ?
- Écoute, je crois que tu comprends rien au métier, les blogueurs, ce sont des influenceurs, c’est pour ça que les marques leur envoient des cadeaux. Du coup ils parlent de la marque et tout le monde est gagnant : le lecteur qui est bien conseillé, le blogueur, qui est bien soigné, et la marque est bien promue avec des ambassadeurs et de la conversation. Notre but en tant qu’agence, c’est de nous constituer un pool de blogueurs qui viennent en priorité à nos événements et sont les ambassadeurs de nos clients.
- Mais à terme ça va se voir non ? Qu’on utilise toujours les mêmes vendus, et ni les marques, ni les blogueurs n’en sortiront gagnants… »
L’Account Manager Social Media Consultant Confirmé avait abusé du café ce jour là, plus que d’accoutumée et s’est exclamé :
« Continue de contester comme ça et je n’appuierai pas ton embauche en fin de stage. Et ouais, tu ne seras jamais Account Manager Social Media Junior ici ! »
Mal lui en a pris, le stagiaire n’est jamais revenu et il a dû écumer à nouveau tout Twitter pour en trouver un nouveau.
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Billet initialement publié chez Cyroul
Image CC Flickr Graffiti Land, threefishsleeping et Premier Packaging
]]>Quinze ans que je n’y avais pas touché. Peur du regard des autres, le jugement de la famille, des amis, franchement à ton âge, ma chérie, à quoi ça te sert de faire des études pour retomber si bas… Tu es déprimée ? Et puis je suis arrivée chez OWNI, ils se sont ligués pour me faire retomber, en me tentant à coup de liens affriolants. Alors j’ai craqué, je suis allée me fournir. OSEF les rires moqueurs, je ne suis pas seule : les AFOL (Adult Fans Of LEGO) sont parmi vous, pour le plus grand bénéfice de LEGO. Au bord de la faillite dans les années 90, pas très fraiche au début des années 2000, la marque a su se reconstruire, entre autres en s’adressant au public des adultes, et en gérant cette communauté de façon particulièrement intelligente. Le modèle danois a encore frappé…
Petit come-back. LEGO à la base, c’est le jouet familial par excellence, celui qu’on offre à son petit neveu. Contrairement à Tintin, passé l’âge de 12 ans, c’était franchement craignos d’y jouer, genre “faudrait passer au stade suivant, tu as du poil aux pattes maintenant.” Il y a bien la gamme LEGO TECHNIC qui est lancée en 1977, mais son cœur de cible, ce sont les (pré)ados.
Le premier vrai contact avec les adultes a lieu en 1999. La marque s’aperçoit que des personnes ont hackés Mindstorm, une gamme créée l’année précédente, permettant de construire et de programmer des robots, ce qui plait bien aux geeks. Nos hackers ont écrit à ce sujet et la compagnie, au lieu de piailler au piratage, entre en contact avec eux et entame le dialogue. La même année, tiens, tiens la fonction de responsable du community engagement est créée. La fin des années, 90, c’est aussi le début de l’essor du web grand public, les AFOL éparpillés, isolés, se mettent alors à communiquer entre eux. Et tout le reste n’est que dévolution bien encadrée.
Avant de caresser LEGO dans le sens du poil, entendons-nous sur ce que le terme “marque” signifie. Le copyright n’est pas une notion qui lui est inconnue, ce ne sont pas non plus des Bisounours, loin de là, elle a déjà intenté des procès pour le protéger. Là où LEGO se montre futé, c’est en laissant une grande liberté à sa communauté dans l’usage qui est fait de ses produits et en l’associant à son développement. Une vision au fond parfaitement pragmatique : “Nous n’avons pas eu de stratégie pour attirer les adultes, mais plutôt pour tisser du lien, explique Tormod Askildsen, en charge du community engagement et de la communication. On s’accompagne, on organise des évènements, on prends du feed-back. Nous ne pouvons pas contrôler nos fans, ils créent ce qu’ils veulent créer. La marque vit dans l’esprit des consommateurs. Si elle ne vit pas là, elle n’est nulle part. C’est un écosystème réunissant le groupe et les consommateurs.”
Et tant pis si ça donne parfois des films pornos. Plus clean, Bricks in motion, The Brick Testament, Balakov… contribuent gracieusement à faire la publicité de la marque. Sans pour autant les soutenir officiellement, comme nous l’expliquait Brendan Powell Smith : sa Bible en LEGO contient un peu de sexe et de la violence, toutes notions que la marque ne peut, image oblige, cautionner officiellement, mais elle ne va pas non plus lui chercher des poux.
Concrètement, un système d’ambassadeurs a aussi été mis en place. Au nombre de quarante, répartis dans vingt-deux pays, ces bénévoles élus -admirons au passage ce subtil moyen d’optimiser ses RH-, servent d’interface entre la base et l’entreprise. “Nous nous réunissons avec eux en juin, pour discuter, échanger, voire leur présenter des projets top secrets. Nous leur partageons des informations confidentielles ou nous les intégrons au process de développement”, détaille Tormod Askildsen. Une charge chronophage, ce qui explique que la France n’est pas d’ambassadeur actuellement : trop de travail, il a démissionné !
Autres ambassadeurs de choix, des artistes. Pour le coup, certains sont associés officiellement à la marque, par exemple Nathan Sawaya. “The Brick ArtistTM, comme il se présente, fait des sculptures en LEGO (voir ci-contre).
En revanche, la marque n’a pas de page Facebook officielle, comme s’en explique Tormod Askildsen : “Facebook n’est qu’une plateforme. Avoir une stratégie social media, c’est utiliser les technologies pour construire des relations. Pleins de plateformes font ça. Facebook développe son propre business model et nous interrogeons sur l’opportunité de créer d’une page.” Par contre, ils utilisent une plateforme en ligne pour communiquer et des pages produits.
Les pages non-officielles ne sont pas dédaignées. Récemment, l’administrateur de la page “Pour tous ceux qui ont connu la douleur en marchant sur un LEGO!” -378 000 likes et autant de martyrs de la brique ?- leur a écrit pour qu’ils fassent des excuses officielles. Et bien ils ont répondu avec humour :
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Toujours au rayon “sollicitons notre communauté”, la marque s’est engagé dans un processus de co-création à base de crowdsourcing. Ils ont par exemple lancé LEGO Click, un site communautaire innovant rassemblant designers, artistes et créatifs où ils font part de leurs idées liées au jouet. Le tout relayé par Twitter (via le hashtag #legoclick), Facebook, Flickr et YouTube. Reste tout de même à faire le tri dans toute cette production.
Dans le même esprit, les membres de LUP’s (LEGO Universe partners, “partenaire”, avec tout ce que cela sous-entend de communication horizontale-) travaillent avec le staff pro pour construire les contenus de LEGO Universe, un MMO ( Massively Multiplayer Online game). Un comité réduit de représentants était présent au Consumer Electronics Show (CES) 2010, le grand raout de Las Vegas consacré à l’informatique et à l’électronique grand public, au cours duquel une bande-annonce a été dévoilée. Ils ont causé co-création et fait des démonstrations d’outils de construction.
En revanche, elle ne développe en revanche pas énormément de produits spécifiquement pour cette cible. Hormis la gamme Mindstorm -quoique, officiellement, c’est pour les plus de 10 ans, tendance Sheldon, le geek de The Big Band theory-, on trouve quelques produits collector coûteux mais cela reste marginal.
Si l’écosystème ainsi bâti leur dit d’aller voir du côté des personnes âgées, un bon plan vu le vieillissement du marché européen, et bien ils semblent prêts à y aller : “Nous ne passons pas d’une marque pour enfants à une marque pour adulte, nous accompagnons tout au long de la vie. Il n’y a pas de raison pour s’arrêter de jouer avec des LEGO à 12 ans. Il existe plein de choses à faire pour les ados ou même les retraités, il existe des opportunités créatives à tout âge.” Mémé, tu avais déjà la Wii, prépare-toi à jouer avec des Duplo Senior. Même si tu as de l’arthrose, tu verras tu vas t’éclater et c’est super pour lutter contre Alzheimer les jeux de construction.
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À lire : social media case study : LEGO CLICK ; photo CC Flickr Toms Bauģis Tony the Misfit
Gratitude envers NKB pour son support linguistique.
Disclosure : je n’ai pas reçu la moindre brique pour l’écriture de cet article tout à la gloire du community management de LEGO.
]]>On a pu lire de nombreuses analyses de ce cas important au cours des quinze derniers jours. J’en rejoins certaines, d’autres moins : aussi est-ce à mon tour de m’y coller, avec une reconstitution et une analyse des grands enseignements de cette crise.
Attention, billet long : paresseux s’abstenir.
Greenpeace qui attaque Nestlé sur la question de l’huile de palme, Nestlé qui réagit de travers, la page Facebook du groupe envahie par des commentaires négatifs, un gros buzz sur les médias sociaux, des reprises dans les grands médias et un cours de bourse qui se casse la figure : c’est LE cas de crise web de ce début d’année.
On a pu lire de nombreuses analyses de ce cas important au cours des quinze derniers jours. J’en rejoins certaines, d’autres moins : aussi est-ce à mon tour de m’y coller, avec une reconstitution et une analyse des grands enseignements de cette crise.
Attention, billet long : paresseux s’abstenir.
CHRONOLOGIE DES ÉVÉNEMENTS
L’affaire, donc : à la mi-mars, Greenpeace a déclenché une campagne online contre KitKat, marque du groupe Nestlé, responsable à ses yeux de la déforestation de l’Indonésie pour la production de l’huile de palme.
On peut lire une chronologie de la crise ici, et une interview de Greenpeace sur son dispositif là.
Au travers des différentes sources que j’ai pu réunir, voici une reconstitution des faits :
16 mars : le rapport Greenpeace
Greenpeace incrimine Nestlé dans un rapport sur la déforestation en Indonésie. Les victimes sont le climat, la forêt et les orangs-outangs.
17 mars : la machine se met en route
Nestlé répond dans une position officielle qu’il ne travaille plus avec le fournisseur incriminé, Sinar Mas, et dit son engagement à n’utiliser plus que de l’huile de palme « durable » en 2015 (un engagement qui semble antérieur).
Je ne suis pas sûr de savoir si cette position a été publiée avant ou après les autres événements de la journée (voir ci-dessous), mais peu importe.
Greenpeace entre en campagne avec mini-sites dédiés à l’appui, sur lesquels on trouve vidéo parodique, « kit de campagne » (avec logos détournés), information de référence, fil Twitter en temps réel, connection avec Facebook, Twitter et YouTube, e-cards de Pâques, email à envoyer au président de Nestlé, etc.
Des militants Greenpeace déguisés en orangs-outangs manifestent devant les bureaux du groupe en Angleterre.
Greenpeace poste la vidéo parodique sur YouTube, parodiant le concept « have a break » de KitKat de manière, disons, interpellante :
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Alors que la vidéo a été vue moins de 1000 fois, Nestlé la fait retirer de YouTube pour violation du copyright.
Réponse de Greenpeace : republication de la vidéo sur Viméo et information via les médias sociaux comme quoi Nestlé a tenté de censurer la vidéo.
Les militants Greenpeace commencent à poster des commentaires négatifs sur la page Facebook de Nestlé, qui compte 90 000 fans. Nestlé ne les censure pas.
Nestlé répond via un statut sur sa page Facebook et renvoie vers la page « statements » de son site corporate – le post reçoit trente commentaires.
Certains utilisateurs Facebook modifient leur photo de profil au profit du logo KitKat détourné en « Killer », créant un « mème ».
En parallèle, Nestlé publie aussi sa position sur Twitter (moins de 1000 followers) et répond à deux commentaires.
18 mars
Nestlé reçoit un certain nombre de critiques sur la manière dont la page est gérée et réagit de façon sèche. Un statut demande aux internautes de ne pas utiliser le logo détourné.
Nouveau statut Nestlé, reprenant la position officielle. Une quarantaine de commentaires s’ensuivent.
Le même jour, Nestlé publie un update plus détaillé sur son site corporate, sous la forme d’un questions-réponses.
19 mars : emballement sur Facebook
C’est le jour où l’activité sur la page Facebook et dans les médias sociaux sera la plus intense. Nestlé demande aux utilisateurs Facebook de ne pas utiliser le logo KitKat détourné (tout en se disant prêt à accepter tous les commentaires). C’est le premier d’une série de huit statuts consécutifs dans la journée, qui seront commentés de 30 à 200 fois.
Nestlé publie un update de « mea culpa » sur la demande de non-utilisation du logo détourné et l’impolitesse des réponses faites.
L’histoire fait le tour des médias sociaux et de Twitter en particulier, alimentée notamment par Greenpeace qui a habillé ses pages web et médias sociaux aux couleurs de la campagne « Killer » et renvoie vers la page Facebook de Nestlé.
Nestlé republie aussi sa position sur Twitter.
Il est mentionné à plusieurs reprises que Nestlé a fermé sa page Facebook pendant quelques jours, mais je n’ai pas réussi à savoir quand exactement.
22 mars
Nouveau statut de Nestlé : « Social media: as you can see we’re learning as we go. Thanks for the comments. »
Le syndicat des producteurs d’huile de palme indonésiens publie un communiqué menaçant Nestlé de boycott.
23 mars et depuis
Greenpeace appelle a continuer à faire pression sur Nestlé : les engagements pris ne sont « pas suffisants ».
On notera aussi le très grand nombre de posts anti-Nestlé sur la page Facebook, dans l’onglet « just fans » : le rythme de publication continue à être soutenu (une vingtaine rien qu’aujourd’hui, trois semaines après les faits). Cela continue à être le principal élément visible aujourd’hui. Nestlé ne les retire pas.
LES QUESTIONS QUE CE CAS POSE
La première question est la suivante : la crise présente-t-elle un caractère exceptionnel ?
C’est une des questions les plus importantes et la réponse est oui et non.
La campagne est-elle exceptionnelle par le caractère de l’attaque de Greenpeace ?
Pas vraiment. Les méthodes de Greenpeace sont connues et on a déjà vu de sa part des cas de campagnes :
- ciblées contre une marque
- produisant un rapport « choc » de référence
- parodiant les codes et les publicités de la marque, vidéo à l’appui
- proposant un site dédié et habillant les espaces web de l’ONG
- équipant les militants pour faire du bruit (e-mailing au président de l’entreprise, maintenant social media)
- comportant des manifestations « IRL » d’activistes
Les précédentes campagnes Greenpeace contre Apple et Dove, contre la déforestation de l’Indonésie déjà, étaient de bons exemples d’un peu tout cela.
L’originalité de la campagne Greenpeace repose donc plutôt sur la combinaison des moyens proposés et sur le fait d’utiliser tous les canaux disponibles, comme la modification des avatars des militants et le vandalisme de la page Facebook de la marque.
On l’avait vu à l’occasion du « hoax » Sprite de l’été dernier : les formes d’attaques contre les marques se font de plus en plus sophistiquées. La contestation des marques et des entreprises a toujours existé, elle s’étend sous de nouvelles formes, de nouveaux territoires et avec plus de professionnalisme.
Le web social offre aux organisations qui ont des bases de militants de nouveaux moyens d’action : c’était d’ailleurs la principale leçon de la campagne online du candidat Obama.
Là où le cas Nestlé n’a pas de précédent, c’est dans le vandalisme de la page Facebook de l’entreprise ciblée. Et c’est justement sur cet espace-là que Nestlé a commis ses erreurs.
Mais dire qu’on entre dans l’ère de la web-guérilla, comme le fait ReadWriteWeb, n’aura comme effet de faire fuir les entreprises du web social dont le cauchemar est de se retrouver à gérer une situation similaire à Nestlé.
La campagne est-elle exceptionnelle par les résultats qu’elle a obtenus ?
Oui, mais pas unique pour autant. Pour répondre à cette question, je prendrais quatre indicateurs qui se veulent objectifs :
- le nombre de vidéos vues. Greenpeace en comptabilise plus de 900 000 sur l’ensemble de la campagne. Il est certain qu’aucune entreprise ne signerait pour avoir 900 000 vues sur une vidéo dénigrante. Pour autant, on a déjà vu des phénomènes d’embrasement plus importants : les vidéos Domino’s par exemple avaient totalisé 1 million de vues en deux jours. Les vidéos Sprite sus-mentionnées n’en étaient pas loin après quelques jours d’activité. Certaines vidéos de « mauvaises pratiques » de la grande distribution ont été vues des millions de fois sur Dailymotion.
- l’activité sur la page Facebook. Les statuts postés par Nestlé ont donc été commentés jusqu’à 200 fois, ce qui n’est somme toute pas gigantesque pour une page qui compte 90 000 fans. En revanche, sur l’onglet « just fans », c’est un véritable carnage.
- La visibilité dans les médias de masse. Difficile d’avoir une réponse claire à cette question pourtant clé : c’est lorsque la crise bascule dans les médias de masse que l’entreprise ou la marque est véritablement en danger. Hors, il est difficile de reconstituer le bruit « offline » autour de cette affaire. On retrouve assez facilement la couverture des grands médias anglophones de la presse écrite ; en ce qui concerne l’impact télévision et radio, je n’ai pas beaucoup d’éléments.
- l’impact sur le cours de bourse : il est réel comme le montre la capture d’écran de ReadWriteWeb. Mais pas forcément durable.
À noter enfin sur ces aspects quantitatifs : Greenpeace annonce 120 000 e-mails envoyés à Nestlé.
Le reste (billets sur les blogs, mentions sur Twitter, etc.) est surtout un gros os à ronger pour les experts en médias sociaux qui font leurs choux gras de ce genre de cas, pas si fréquents d’ailleurs, afin de démontrer l’impact du web social en matière d’opinion et de réputation.
Méfions-nous de la circulation circulaire (tous les professionnels de la communication en auront entendu parler, mais quelle part du grand public ?) et de l’ethnocentrisme du microcosme et de l’intelligentsia des médias sociaux (« les blogs que je lis en parlent, donc tout le monde en parle »).
Mais surtout, la visibilité de cette campagne, Greenpeace la doit à… Nestlé : ce qui a permis à la mayonnaise de monter, c’est avant tout la réaction de Nestlé qui a ouvert des brèches à Greenpeace.
Chercher à faire retirer la vidéo a été une aubaine pour Greenpeace. Demander aux internautes de ne pas utiliser le logo détourné à envenimé les choses.
Bref, et une nouvelle fois dans l’histoire de la communication sensible, c’est en plaçant le juridique (le droit) avant l’opinion (le débat, la morale) qu’on jette de l’huile sur le feu.
Pour autant, la campagne montre-t-elle le rôle déterminant du community manager ?
On aurait tort de croire qu’un bon community manager, ou un bon community management, aurait permis de rééquilibrer la situation (voir l’analyse très juste d’Anthony Poncier) : le community management ici aurait surtout pu éviter quelques erreurs :
- la demande de non-utilisation du logo détourné
- le trop grand nombre de statuts qui montrait une forme de panique
- les réponses sèches à certains internautes, qui ont donné lieu à des captures d’écran qui sont en effet assez hallucinantes. L’humilité est pourtant l’une des premières valeurs à s’appliquer en situation sensible. Ici, la tonalité employée est évidemment inadmissible de la part d’une entreprise… C’est en réalité celle d’un individu, forcément rendu nerveux par les événements, et on ne peut faire que l’hypothèse d’une trop grande liberté laissée à l’administrateur de la page.
Cela dit, je trouve injuste de dire que Nestlé n’a pas géré ou a fait preuve de l’amateurisme le plus total.
Des erreurs plombantes ont été commises, cf. ci-dessus, mais c’est assez facile de charger l’entreprise et on notera que Nestlé a quand même :
- fait preuve de réactivité : réponses quasi-immédiates sur le site du groupe, certes dans une tonalité très corporate, mais elles étaient là et bien là
- systématiquement renvoyé sur ces positions qui n’ont pas bougé
- observé un principe de « laisser parler », quitte à laisser sa page Facebook se faire vandaliser
- publié son mea culpa quant à son attitude
Quelle organisation pour les médias sociaux ?
On peut se demander à qui reportait l’administrateur de la page Facebook Nestlé, ce qui pose justement la question de l’organisation de la fonction social media dans l’entreprise.
Derrière cela, il y a deux choses :
- la question du profil du community manager
Si vous vous êtes intéressés au cas, vous aurez déjà lu plusieurs fois qu’il faut cesser de confier des postes de community managers à des juniors juste parce qu’ils sont de la génération Y. C’est tout à fait exact. Jeremiah Owyang : « voyez votre page Facebook comme un point de vente. Le confieriez-vous à un junior ? ».
La compétence est complexe parce qu’elle suppose à la fois une compréhension des codes des médias sociaux (et on observe de sacrés gaps culturels entre, disons, les moins de 35 ans et les plus de 35 ans) et une compréhension des enjeux de marque (rare chez les juniors), voire du porte-parolat (qui demande carrément d’être très senior).
C’est aussi une compétence qui s’encadre : par exemple avec des guides d’animation des médias sociaux et des formations à l’animation des espaces sociaux. Pas de solution miracle pour autant : le community manager va apprendre l’essentiel en marchant.
- la question du pilotage de la fonction.
Je suis effaré de voir ReadWriteWeb (dont vous aurez compris que le papier m’a quelque peu… agacé) écrire que les agences de communication doivent être hors du coup, c’est une grave méconnaissance du rôle des agences qui sont là pour conseiller (et justement pour éviter aux entreprises de commettre des erreurs), pas pour piloter… Mais passons.
Plus globalement, il s’agit de savoir si la fonction community management relève du marketing (ce qui fait sens sur Facebook quand on est sur une page de marque, outil de relation client avant tout), de la communication (ce qui fait sens pour un espace d’entreprise), d’une autre direction ou d’un autre service.
Le ou les community managers de Nestlé viennent-ils d’une culture marketing ou réputation ? Dans un cas de crise comme ici, c’est en tout cas à la communication de piloter, pas au marketing. Les process internes doivent donc permettre à la com de prendre le lead.
Quid du porte-parolat sur les médias sociaux ?
Et oui, une entreprise cotée a des obligations et on voit ici à quel point les médias sociaux sèment la zizanie dans l’organisation de la communication des entreprises : un statut, un commentaire sur Facebook restent des prises de position publiques de la compagnie… Les procédures de validation ont parfois du bon.
Un problème de stratégie ?
On a aussi beaucoup lu dans les billets d’analyse de cette crise Nestlé que cela montrait que Nestlé n’avait pas de stratégie médias sociaux, pas de réflexion, que cela montrait qu’on avait juste lancé un outil, etc.
Peut-être est-ce le cas, peut-être pas, je n’en sais rien : personnellement, je ne crois pas que Nestlé partait de zéro ou a construit tout cela n’importe comment ; mais je crois surtout que la question posée ici est celle de la bonne gestion de crise plutôt que de la bonne stratégie médias sociaux.
Car ce n’est pas en définissant des principes de bonne conduite sur sa page Facebook que l’on empêche des militants d’ONG motivés de la pourrir.
Comment gérer les attaques ?
C’est ici qu’il ne faut pas confondre expertise des médias sociaux et expertise de la crise. De nombreuses entreprises se préparent aux situations de crise en réfléchissant sur la nature des risques, les scénarios possibles, en définissant des process et des responsabilités et en formant leurs équipes. D’autres ne le font pas et ce cas vient rappeler qu’il est tout simplement bon de se préparer.
Rien de nouveau sous le soleil : il faut se préparer aux crises, entretenir son état de préparation… et intégrer la dimension social media dans la crise, à plusieurs niveaux :
- dans l’analyse des risques (les médias sociaux font naître de nouveaux risques ou permettent à des signaux de se propager plus facilement)
- dans la fonction de veille (savoir ce qui se dit en situation sensible)
- dans la gestion de crise (du site corporate aux espace sociaux, en passant par les moteurs de recherche), ce qui suppose a minima d’intégrer un spécialiste du web dans la cellule de crise. Voir notre billet « 15 trucs pour la communication de crise en ligne ».
Qu’aurait pu faire Nestlé ?
En dehors de toutes les considérations de stratégie ou d’organisation, la réponse n’est pas franchement simple.
Il me paraît d’abord difficile, comme je le disais ci-dessus, de se fixer comme objectif de calmer les ardeurs de militants d’ONG. Ils ne sont pas là pour être de bonne foi avec Nestlé et feront tout ce qu’ils peuvent pour appuyer là où ça fait mal. Avec ce type de public, c’est une bataille de communication qui s’engage, mais l’enjeu est la décision industrielle (raccourcir le délai de 2015 comme horizon pour une « huile de palme 100% durable », entre autres).
Au mieux peut-on donc ne pas envenimer la situation, ce qui consiste souvent à faire le dos rond.
De plus, il s’agit d’un sujet où la marque n’aura pas d’ambassadeurs : on ne peut pas imaginer de voir la conversation s’équilibrer d’elle-même.
Il aurait sans doute fallu davantage de proximité dans la formulation des positions : la production d’une vidéo questions – réponses avec le président ou l’autorité compétente chez Nestlé aurait peut-être permis de mieux faire comprendre les positions de la compagnie et permis d’équilibrer le débat.
Je ne crois pas à la possibilité de cantonner le débat dans un onglet spécifique de la page Facebook prévu à cet effet. Je pencherais plutôt pour la définition d’une politique d’usage de la page Facebook qui renverrait l’intégralité de la discussion « huile de palme » sur un espace type plate-forme de feedback (« si vous souhaitez parler de l’huile de palme, rendez-vous sur notre espace dédié »), plus facile à modérer.
Maintenant, faut-il ou pas supprimer les commentaires négatifs qui continuent à être postés en permanence, telle est la question. C’est tout à l’honneur de Nestlé de les laisser en ligne, mais ça fait sacrément désordre.
Franchement ? Comme Cédric Deniaud, qui a à mon avis produit la meilleure analyse du web francophone sur le sujet, je définirais le « contrat social » de la page Facebook et une fois que l’espace de « discussion » sur l’huile de palme (et/ou d’autres sujets) est créé, je renverrais la totalité des conversations dessus, quitte à supprimer les commentaires « hors sujet ».
La bonne nouvelle pour Nestlé, c’est que la critique se lasse toujours. Nestlé doit donc aussi et surtout reprendre le cours de l’animation de sa page avec son flux d’infos et d’annonces, et reprendre la question de son organisation social media et process de crise.
LES ENSEIGNEMENTS
Allez hop, on résume en 10 points clé :
1-Cette crise nous apprend que les attaques contre les marques peuvent se faire de façon de plus en plus sophistiquée, en s’engouffrant sur les espaces sociaux des marques.
2-Facebook (beaucoup plus que Twitter) est le lieu à risque, de par la population massive qu’on y trouve d’une part, de par la liberté de s’exprimer que les fonctionnalités permettent.
3-Quand la logique juridique prend le pas sur la logique d’opinion, on risque le pire. Les codes du web accommodent mal des réglementations : les entreprises sont renvoyées à des interrogations morales et ne peuvent se réfugier derrière le droit.
4-Tous les cas de démonstration de l’impact du web, comme celui-ci, sont utilisés par les professionnels de la profession à des fins prosélytes. C’est à la fois normal et polluant, mais cela invite à bien se poser la question de l’impact réel.
5-Cette crise peut être qualifiée de crise à fort impact, mais on n’est pas pour autant devant quelque chose de dévastateur (notamment parce que l’impact dans les médias audiovisuels ne semble pas clair et massif)
6-L’activisme est avant tout un truc anglo-saxon. Très clair ici.
7-C’est grâce aux erreurs de Nestlé que Greenpeace a réussi sa campagne.
8-Cette crise pose la question de la réflexion de l’entreprise sur la gestion de ses risques, plutôt que de celle de sa stratégie médias sociaux (mais elle ne l’empêche pas pour autant). Il faut plus que jamais se préparer aux risques (évaluation, scénarios, process, formations), et y intégrer la dimension médias sociaux.
9-La bonne gestion des médias sociaux est avant tout une question d’organisation pour les entreprises, et une question complexe. Nécessité d’avoir une stratégie claire, besoin de profils seniors, de multi-compétences, enjeux de périmètres entre la communication et le marketing, ROI à expliciter : c’est la quadrature du cercle et il faut faire des choix.
10-Chaque espace social doit avoir une vocation clairement définie : le mythe de la transparence et du laisser-faire doit être dépassé. Laisser publier des messages négatifs revient in fine à les encourager (enfin, à ne pas les décourager). Et à ce sujet, Facebook est davantage un lieu à vocation « marketing » que « corporate ». Même si les deux ne s’excluent pas toujours.
Billet initialement publié sur Internet & Opinion(s)
Photo de une CC Flickr chibi_ro
]]>Le début de l’histoire est banal.
1-Un journaliste a une minute pour traiter d’un sujet, et en une minute, il ne peut que mal le traiter.
2-Il s’appuie sur un court article d’un autre média – Libération – et le copié-collé n’aide pas à penser.
3-Il trébuche sur un sigle.
4-William Leymergie l’interrompt malicieusement.
5-Il persiste dans son erreur et reprend l’idée d’une
Des éléments de la culture populaire ont toujours été attaqués par les média qui se font alors porte-parole de l’élite. Mais le 21ième siècle a quelque chose de différent. Les opinions ne sont plus cantonnées dans les bistrots et les ateliers. Le réseau est un des lieux où elles se forment, se transmettent et se diffusent.
Nous sommes maintenant entrés dans une économie du commentaire. On peut s’en réjouir ou le déplorer, mais il faut prendre le fait en compte. Contrairement au siècle précédent, le net offre un lieu où les opinions peuvent se former presque immédiatement. Parmi les téléspectateurs, certains ont l’ordinateur sur les genoux ou le smartphone à portée de main. Ils sont en recherche d’interactivité et chercheront sur le réseau des espaces où exprimer ce qu’ils ont à dire.
Naissance d’un mème
Une première vidéo est postée sur Youtube ; elle est sobrement appelée France 2 – Télématin – MMORPG. Poussée entre autre par Korben, elle est amplement vue et commentée.
À partir de la première vidéo sur YouTube, il se produit ici quelque chose : le mèmeW MEUPORG nait. Il est décliné en images, en site, en T-shirts, en fan pages Facebook. La vidéo “originale” est éditée et remixée.
Les média n’ont pas encore pris suffisamment en compte force de ce mouvement. France Télévisions est restée muette sur Twitter. Le journaliste Nathanaël de Rincquesen n’a pas non plus pris la mesure du fait que son nom est maintenant attaché à MEUPORG et que la maison brûle jusque dans le forum de l’émission Télématin et sa fan page sur Facebook est également campée par des commentaires ironiques.
On peut bien entendu faire le pari qu’il s’agit d’un de ces feux de paille dont les mondes numériques sont coutumiers. Mais le mouvement est bien plus profond. Ce n’est pas une émeute, c’est le signe d’une révolution. Pour ceux qui ne voudraient pas prendre au sérieux la LOL Machine, peut-être est-ce-que l’apparition d’un groupe comme l’Union pour un MEUPORG Populaire (UMP) donnera à penser.
Les gameurs ne sont pas des adolescents retranchés dans leurs chambres, coupés du bruit du monde. Ce sont pour la plupart de jeunes adultes, au fait de ce qui se passe dans leur société. Et ils ont un moyen de se faire entendre.
Coté médias
Coté média, on a l’impression d’assister à la description de Mc Luhan : l’onde de choc Internet a frappé les média avec tant de force qu’ils sont comme anesthésiés. : France 2 se montre incapable de mettre en place des mesures pour contenir et gérer la crise. Pourtant, il n’y a aucun doute : les crises de ce genre vont se multiplier et vont augmenter en intensité. Elles ne concernent pas seulement les média. En ce moment, Nestlé fait l’objet d’une attaque de ce type sur Facebook : les lieux en ligne sont aussi des lieux de contestation, et pas seulement des lieux où rassembler des audiences passives. Certains se retrouvent avec les loups alors qu’ils pensaient tondre des moutons. Faut il le préciser ? Internet sera un des lieux de manifestation du malaise qui sourd dans nos sociétés.
Télématin fait en moyenne 1,4 millions de téléspectateurs. Cela veut dire que la seule vidéo initiale génère 14% de leur audience quotidienne. On peut bien entendu se dire qu’il s’agit de chiffres générés sur plusieurs jours, alors que les 1,4 millions de téléspectateurs sont réalisés quotidiennement. Mais, une telle augmentation de l’attention serait bienvenue si elle était associée a une image positive de l’émission ou de la chaîne. Malheureusement, c’est bien plutôt à une destruction de l’image du journaliste, de l’émission, de la chaîne et des média mainstream à laquelle on assiste aujourd’hui.
On serait en droit d’attendre que les community managers de la chaîne interviennent et aident à sortir de la crise.C’est dans ces moments que ce nouveau métier prend toute sa valeurs, et, d’évidence, certains manquent l’occasion de monter ce à quoi ils peuvent être utiles.
]]>Billet initialement publié sur Psy et geek ;-)
Photo CC Flickr Matt Hamm
Je ne sais plus par quel bout commencer.
Il fut une époque, où, pour la première fois, j’installais ICQ. Là, par miracle, en entrant le nom de ma ville, j’avais une liste de personnes, et j’osais, suivant des critères bien personnels, les interpeller.
Il fut une époque où, pour la première fois, j’installais mIRC. Là, par miracle, en listant les salons de discussion hébergés par le serveur, j’en trouvais un qui, forcement, m’intéressait.
Il fut une époque où, pour la première fois, j’installais un jeu multijoueur. Là, presque par miracle, après “un peu” de temps consacré à la configuration, je partageais un moment de divertissement avec un ami, ou un inconnu.
Il fut une époque où, pour concentrer tous ces amis que je croisais finalement partout au même endroit, on installait un phpBB sur un coin d’hebergement multimania (mygale ?).
Il fut une époque où, l’arrivée de gandi sur le marché de la vente de nom de domaine fut une révolution.
Et puis tout le monde parla de “stratégie internet”, les plus grand mirent les pieds dans ce nouveau monde qu’ils ne connaissaient pas, faisant confiance à des personnes ou entreprises qui disaient s’y connaitre, avoir fait des études de marché, et que oui, commercialement parlant, pour faire du business, internet, c’est l’avenir. Et ils avaient raison, internet, c’était l’avenir. Mais demain, c’est loin.
Rideau. Explosion de la bulle. RAZ de la crédibilité du support, on recommence mais…
Cette fois ce sont les gens qui ont grandi avec le net qui sont aux commandes, ils se lancent sur des concepts auxquels ils croient, puisque c’est ce qu’ils veulent, eux, mais qu’ils ne trouvent pas. Et ce n’est pas un hasard si le web devient “social”. Il révèle juste sa vraie nature. Les blogs font leur apparition, et servent déjà de tremplin alternatif aux sites innovants (qui a dit LaFraise) qui ont bien comprit qu’ils peuvent se passer des régies publicitaires.
Je ne suis pas historien du net, juste contemporain, et quand même un peu acteur, à mon echelle. Je vais m’arrêter là dans cette mise en situation de peur de dire un peu plus n’importe quoi. Je vais me réorienter vers le fond du post, le sujet qui fait que vous venez de vous taper 384 mots.
Ca tombe bien que j’en arrive à parler de LaFraise, ça va être mon exemple d’illustration.
Ayant évolué en même temps que les outils, aujourd’hui, je suis moins sur mIRC que sur twitter et Facebook. Et je dois avouer que ces derniers mois, j’ai un peu peur. Je me sens comme un navi qui voit débarquer tout un tas de Jack Sully sur sa planète oueb 2.0. Ils utilisent “nos” outils, apprivoisent “notre” langage, et finissent par calquer nos usages. Ok, le parallèle avec AVATAR est en partie une chasse au référencement, mais au final assez parlant. Ils, ce sont les nouveaux chercheurs d’or. Oh, ils peuvent être passionnés par le web, et foncièrement honnêtes dans leur démarche, mais ce qu’ils veulent, c’est transformer notre âme, et finalement même, la détruire. Tels des apprentis sorciers, ils courent à la catastrophe.
Revenons à notre Fraise. Plus qu’un site de vente de t-shirt, le site est devenu en 3 ans un véritable modèle de communauté virtuelle. Avec ses fans, ses mécontents cycliques, et surtout, surtout, son élément fédérateur Patrice Cassard. Mais il n’avait rien demandé à personne. IL n’était pas son concept. Il s’est juste retrouvé là, à animer le site, son idée avait une âme. Je ne pense pas que Patrice Cassard se soit une seule seconde proclamé community manager de quoi que ce soit.
Ensuite ? Ensuite il revend son site, et le nouveau propriétaire recrute lui, des community manager. Oh oui, le site fonctionne toujours, mais la clientèle est elle restée la même ?
Ca y est, j’ai cité le gros mot du moment. Community Manager.
Et oui, le mot existe, et puisque le mot existe, le metier doit aussi exister, non ? C’est évident. Mais si, il a sa définition sur wikipedia.
“Le community manager a pour mission d’animer les échanges entre internautes utilisant un service web commun et de faire respecter les règles de bonne conduite au sein de la communauté.”
Le métier de community manager serait donc une nouvelle apellation pour “modérateur”. Pourquoi pas. Allons plus loin.
Et c’est là que j’ai peur. Quand ça va plus loin. Il y a même une partie de la définition dédiée à la formation, et quand je vois école de commerce, cette fois, ça me file des boutons. Et, cerise sur le gâteau, il y a même une fiche de poste APEC. Ce sont les recruteurs qui vont être contents.
Je me perds dans les dédales d’une chose que je n’arrive pas a expliquer, à exprimer. Je dois absolument faire simple, au risque d’ennuyer la seule personne qui est arrivée à me lire jusqu’ici. Il faut que j’arrête de poster sur des sujets qui touchent mon affect.
NON on ne se proclame pas community manager.
NON on ne se forme pas au métier de community manager
NON on ne devient pas community manager
Les community manager, ca n’existe pas. Soyons humbles s’il vous plait. N’imaginons surtout pas des plans de com de lancement de produit avec un mec dédié à ce lancement qui remuera les bras dans tous les sens pour attirer l’attention. Ça, c’est animateur de supermarché. Alors oui, si le community manager doit être un animateur de supermarché virtuel, de e-commerce, dans ce cas pourquoi pas.
Si la notion de community manager doit disparaitre, c’est au profit de l’appropriation des outils d’aujourd’hui et demain par les entrepreneurs eux même. Qui mieux que la personne impliquée dans un projet peut en parler, doit en parler ? Qui mieux que cette personne peut fédérer autour de son projet, recevoir des encouragements et répondre aux questions ?
Si un tier doit intervenir, ce n’est pas pour s’approprier les actions et faire le travail d’un reponsable de com, mais pour former, accompagner, crédibiliser les outils et le net.
Car comme dirait l’autre, il y a dans ce pays, une fracture. Une fracture ouverte entre les entrepreneurs locaux et les prestataires TIC.
Je ne participerais pas à l’élargissement de cette brèche, mais si vous voulez construire un pont, vous pouvez compter sur moi.
Et vous, tous les Jack Sully, je vous fait confiance pour admettre que le seul moyen de me donner un peu raison, c’est d’admettre que vous avez un petit peu tort.
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]]>Lorsque l’on réalise une formation sur les médias sociaux rien est plus sympathique que de montrer, à ses élèves, la réactivité d’un réseau. Pour cela, en sa qualité de média temps réel, Twitter est un bon exemple… Que de fois, ces dernières semaines, où j’ai expliqué l’outil et ses usages possibles en faisant des démonstrations sur mon propre compte avec des résultats au-delà de mes espérances. Mon réseau est bien vivant et je n’en doutais pas mais comme toute évidence, ça va mieux en le disant
Twitter, outil et vivant : cherchez l’intrus, me direz-vous… A mon sens, il n’y en a pas.
Internet nous offre un espace virtuel entre individus. Bien que la lecture des ouvrages deGilles Deleuze, notamment Différence et Répétition, serait plus appropriée pour cerner l’idée de « virtuel », je dirais pour faire synthétique que le virtuel est ce qui n’a pas d’existence actuelle, pas de matérialité tangible. Pourtant, lorsque je m’adresse à mes contacts Twitter en leur disant : « je suis en formation Twitter, quelqu’un pour me faire un signe? #Formation #CM » et que je reçois en moyenne 25 réponses en une demie heure, difficile de penser de manière pragmatique que ce réseau n’a pas d’existence réelle et actuelle. Voilà pourquoi, bien souvent dans mes présentations, je privilégie le terme distanciel. Dans le langage courant, le concept virtuel a bien souvent une connotation d’irréalité, de faux-semblant. Pourtant mes démonstrations tendent à montrer que l’interaction est bien concrète, qu’elle se produit de manière immédiate entre internautes bien vivants mais à distance.
Outre le fait de se dégager des connotations négatives de la réinterprétation du concept « virtuel », ce choix sémantique a aussi un autre intérêt. Je n’ai pas toujours en face de moi un public acquis aux médias sociaux, « pire » certains peuvent être assez hermétiques mais ils auront pourtant à les utiliser dans leur pratique professionnelle ou militante. Alors il convient d’adapter le langage pour rapprocher l’auditoire des outils étudiés. En résumé, je tente de partir de leur réalité de terrain pour conduire mes élèves vers les médias sociaux. Démythifier les outils en les rapportant à des réalités connues de tout un chacun.
Un outil n’est pas magique, il ne suffit pas d’avoir un compte Twitter, par exemple, pour avoir de la réactivité quand on sollicite sa communauté. Un réseau se pense, se construit et demande « patience et longueur de temps » (cf. Le Lion et le Rat, Jean de la Fontaine). Mais de tout cela nous reparlerons dans un prochain billet.
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Et cela peut aller très loin. Le 11 décembre 2009, lefigaro.fr a diffusé son premier article entièrement rédigé par un internaute sous le titre : « Violente altercation dans un avion : un internaute témoigne »
Daccord explique ici comment la rédaction à été amenée à publier ce témoignage après vérifications et quelques coupes dans le papier d’origine…
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Deux exemples de tentatives récentes pour pousser encore plus loin l’interactivité du site :
- la question d’actu : « Ca marche très bien, surtout quand on demande aux internautes si Domenech doit rester entraîneur de l’équipe de France. » Chaque matin ce sont plus de 100.000 personnes qui se connectent pour répondre à ce oui/non, « un sondage sans aucune valeur de panel » , tient-il à rappeler. Les résultats sont publiés dans le journal papier du lendemain.
- les réseaux sociaux : le Figaro possède son propre réseau social sur son site, qui vient de souffler sa première bougie. A ce jour, 60.000 comptes sont actifs. Mais l’objectif d’Antoine Daccord est aussi de « faire vivre la marque hors les murs » . Le Figaro est donc présent sur Facebook (6.000 fans et de 100 à 200 commentaires par articles publiés) et Twitter.
Un petit couac cependant: il semble que le site soit victime de son succès. Avec 15.000 commentaires envoyés par jour, la promesse de publication rapide sous la demi-heure est parfois difficile à tenir, surtout que la direction souhaite continuer à pratiquer la modération « à priori » (le commentaire est relu et approuvé avant d’être mis en ligne).
Qui l’eut cru ? Ce n’est pas la rédaction qui est chargée d’effectuer la modération des commentaires du site du Figaro mais une équipe de 7 personnes dépendant d’un prestataire ! Etonnant, même si un salarié du Figaro est censé superviser l’affaire 24 heures sur 24.
Plus les visiteurs affluent, plus les choses se compliquent. Temps réglementaire pour la lecture d’un commentaire : 6 secondes (sic), « mais parfois il faut y passer 5 minutes » . Attention danger? « Notre objectif est de doubler ces effectifs pour pouvoir effectuer une double lecture, assure Daccord. L’enjeu est peut-être là… mais c’est impossible pour le moment. »
» Article initialement publié sur La Voix du Dodo